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Ensemble pour une croissance durable, responsable et inclusive
Par Audrey Tcherkoff | Présidente exécutive | Institut de l'Economie Positive | 05 mars 2020 | Mis à jour à 09:03

Le Monde est vert
| C’est un fait, le caractère urgent de la crise environnementale et sociale que nous traversons actuellement témoigne de la nécessité de faire évoluer nos modèles de développement.
Désormais, nos préoccupations ne doivent plus se limiter à la seule croissance économique comme finalité. Il nous faut aspirer à un changement radical, qui place environnement, économie et valeurs sociales au centre de nos modèles de croissance. Un modèle d’économie positive, tourné vers des enjeux à long terme et non plus centrés sur l’instant présent, dans l’intérêt des générations futures.
La réussite de cette transformation implique deux impératifs. D’une part, l’engagement de tous les acteurs : citoyens, entreprises, administrations, universités, collectivités locales et ONG, mais aussi nations et gouvernements. D’autre part, la capacité à évaluer la positivité des acteurs publics et privés, en prenant en compte l’ensemble des dynamiques à l’œuvre dans nos sociétés pour dresser l’état des lieux des progrès accomplis… Et de ceux qui restent encore à accomplir.
En 2013, à l’occasion de la première édition du LH Forum, dédiée à l’économie positive territoriale, la fondation Positive Planet publiait le rapport « Pour une économie positive », remis au Président de la République François Hollande. Véritable plaidoyer en faveur d’une croissance responsable, durable et inclusive, respectueuse de l’environnement et au service de la société, le rapport présentait pour la première fois l’indice de positivité de l’économie d’un pays.
Mis au point en collaboration avec le cabinet de conseil en développement durable Nomadéis, cet indice s’articule autour de trois principes majeurs:
Éduquer et financer les générations futures; Préparer les infrastructures pour les générations futures; Créer un consensus pour les générations futures.
Calculé sur la base de données publiques, cet outil n’a pas vocation à se substituer aux indicateurs existants, tels que le PIB et autres critères financiers, mais au contraire à les compléter en s’attachant à évaluer l’ensemble des voies qui permettront d’orienter au mieux les actions des parties prenantes.
Au mois de décembre dernier, à l’occasion du Global Positive Forum, nous présentions la 7ème édition de ce baromètre de la positivité des pays de l’OCDE, dont les résultats s’inscrivent dans la continuité des précédentes années:
Dans le trio de tête, on retrouve l’Islande, suivie de la Norvège et de la Suède, témoignant de l’engagement des pays nordiques en faveur d’une société plus positive. Les Pays-Bas, le Danemark et la Finlande se positionnent directement à la 4ème, la 5ème et la 6ème place.
Parmi les tendances significatives, il nous faut souligner l’excellente performance de l’Islande, qui est passée de la 5e place (2014) à la 1ère place en 2019 et qui tire son épingle du jeu grâce à la gestion exemplaire de ses ressources, la part d’énergies renouvelables, la qualité de l’eau et la maîtrise de ses émissions de dioxyde de carbone. L’Irlande également, passe de la 18ème place en 2014 à la 14ème place, et revendique des avancées dans tous les domaines de la positivité, notamment en matière de soutenabilité́ financière, d’éducation et de solidarité internationale.
L’Australie et le Canada en revanche, semblent rencontrer des difficultés pour maintenir un score de positivité élevé, en dépit de la progression de leur croissance économique.
Par ailleurs, certains pays se distinguent grâce à leurs bonnes pratiques sur des indicateurs spécifiques. C’est le cas du Mexique, à la 33ème place dans le classement général, qui occupe le 2nde position sur le thème de l’éducation grâce à ses différents programmes en faveur de l’éducation destinés aux jeunes issus des milieux les plus fragiles. Sur la question environnementale, l’Islande se distingue en matière d’utilisation responsable de ses ressources naturelles, et la Finlande et Israël (26ème du classement) sur la question de l’identification de projets néfastes pour l’environnement.
Pour cette dernière édition, la France affiche un score de positivité en recul de 3 points, et occupe le 18ème rang du classement général, soit une place de moins par rapport à l’édition précédente.
Ce recul souligne les limites de notre modèle de croissance actuel, et l’urgence pour la France de renouveler son engagement en faveur des générations présentes et futures.
Concernant la dimension « Éduquer et financer les générations futures », l’Hexagone marque une progression de +4 points sur le thème de la finance positive, grâce à ses politiques liées à la réduction du niveau de la dette publique. En revanche, le score lié à l’éducation positive chute de 9 points, celui relatif à la solidarité de 3 points, en raison du faible niveau du montant du PIB consacré à l’aide internationale par rapport aux autres pays de l’OCDE en 2019. En ce qui concerne la dimension « Préparer les infrastructures pour les générations futures », la performance de la France pâtit, entre autres, de l’importance du nucléaire sur la question des énergies renouvelables.
Cependant, il faut également souligner la progression du pays en ce qui concerne les critères liés à la dimension « Créer un consensus pour les générations futures », puisque la France gagne des points sur les questions de la gouvernance, de la parité et de la dualité de l’emploi. En parallèle, le pays obtient le meilleur score de l’ensemble des pays de l’OCDE avec un indice de 85 sur 100 sur la question de la perception de la corruption.
Si la France affiche donc des progrès notoires sur certains sujets essentiels, le bilan global reste mitigé, et il apparaît désormais comme essentiel pour le pays de prendre des mesures concrètes pour réaffirmer son engagement en faveur d’une croissance globale à la fois durable et inclusive, vecteur d’une transformation systémique vers une société positive, bénéfique pour tous.
En concevant ce baromètre, nous avons souhaité créer un repère de l’économie positive, mais aussi un outil en faveur du dialogue. Dans cet objectif, nous avons identifié 4 pistes d’amélioration essentielles à mettre en œuvre par le gouvernement français dès 2020 pour mener son action vers le bien-être des générations futures :
- Renforcer l’accompagnement des jeunes, notamment dans les zones prioritaires d’éducation par une augmentation des moyens humains afin d’améliorer l’insertion ;
- Augmenter la part du PIB destiné à l’Aide Internationale Publique ;
- Déployer une politique de développement territoriale permettant l’accès à la propriété à plus bas coût dans le but de réduire la concentration urbaine ;
- Renforcer la politique de réduction des émissions de GES pour atteindre la neutralité carbone en 2050.
Des évolutions majeures et substantielles, qui pourraient non seulement permettre à la France d’améliorer sa position dans le classement général de la positivité des pays, mais également d’insuffler une dynamique positive à l’échelle internationale. Car si chaque pays demeure responsable des actions qu’il entreprend, c’est ensemble, dans le cadre d’un effort collectif global, que nous pourrons prétendre à un véritable changement de paradigme en faveur d’une planète plus positive.